L’orientalisation du Maghreb: Les Berbères, entre Maghreb et Mashreq
Un des enjeux majeurs des discours mettant en avant – ou au contraire refusant – l’orientalisation du Maghreb a été la place assignée aux Berbères dans l’espace et l’histoire de l’Islam, par les auteurs orientaux comme maghrébins. Le terme « Berbère », qui désigne la population du Maghreb au moment où les Arabes l’envahissent, et dont l’histoire nous est connue seulement à travers la documentation arabe, renvoie à tout ce qui recouvrait l’idée du caractère autochtone, non arabe, et donc non oriental du Maghreb. Comme l’a montré Yves Modéran, l’image des Berbères, des Numides pour les temps romains, fut construite comme l’opposition à la romanité puis à ce qui n’était pas arabe, par négation en quelque sorte. Mais cette altérité coexiste dans les textes avec la revendication du caractère oriental des Berbères, à travers le discours généalogique sur les tribus mais aussi les récits qui donnent une origine orientale aux fondateurs de villes pré-islamiques.Par les Berbères, le Maghreb est alors présenté comme orientalisé avant même la conquête arabe. Mais cette construction de généalogies fictives s’est accompagnée, très vite, d’un discours des auteurs maghrébins qui revendiquait la place originale et éminente des Berbères face aux Orientaux dans le plan divin, par une inversion assumée des polarités de l’Islam et des hiérarchies des peuples musulmans.L’émergence de dynasties berbères, à partir du XIe siècle, s’accompagne alors d’une production littéraire qui célèbre les mérites des Berbères et place le Maghreb comme le nouveau pôle de l’Islam, destiné à supplanter l’Orient.
Coordonné par D. Valérian et organisé par l'École des hautes études hispaniques et ibériques (Casa de Velázquez, Madrid),l'UMR 5648 (CIHAM, Lyon) et l'UMR 8167 (Orient & Méditerranée, Paris)
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